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LOL - Les Olonnois Lisent
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12 octobre 2014

L'oubli, Frederika Amalia Finkelstein

L'oubli, Frederika Amalia Finkelstein, L'Arpenteur, 173 p.

 

Finkelstein

Alma-Dorothéa, simplement nommée Alma, est la narratrice en pleine déprime. Déprime, mais pas dépression. Elle est depuis peu obsédée par l'extermination des juifs par les nazis, une période de l'histoire qu'elle veut oublier. Mais il suffit de décider d'oublier quelque chose, pour que celle-ci vous revienne continuellement en tête. Ce n'est pourtant pas la seule pensée de Alma, elle en a à foison (le Coca-Cola qu'elle boit, les courses de chevaux, son grand-père juif, son frère Balthazar surnommé Bal, le chien qu'elle a eu enfant, la musique, sa console de jeux, etc.), mais tout semble toujours y revenir. C'est le fil rouge qu'elle ne parvient pas à quitter. C'est comme le thème d'une variation musicale qui sans cesse revient, presque à l'identique pendant tout un morceau, et qui pourtant évolue. D'ailleurs, elle évoque les Variations de Goldberg de Glenn Gould.

Je ferme la fenêtre ; mes yeux tombent sur une lézarde : je regarde le mur se fissurer. Ma mémoire, mon cerveau, le temps et le monde sont semblables à cette fissure. Ce n'est pas une chimère. Adolf Hitler détestait les fissures, il aurait fait repeindre immédiatement cette chambre. (p. 23)

On vient de le lire, Alma n'est pas étrangère à son environnement. Bien au contraire, elle l'observe avec minutie.

Elle est aussi un peu obsédée par les chiffres, le 6 étant son « favori » (6 000 000 de juifs exterminés) :

Il n'y a pas de pendule dans ce Mc Donald's, mais je pense qu'il est moins de 10 heures. Je regarde le ticket de caisse : il était 10 h 12 il y a peu. J'ai toute la journée devant moi. 10 h 12 est peut-être l'heure parfaite. Je me demande ce que faisaient les Juifs à Auschwitz à 10 h 12. Je sais que Louis XVI est mort à 10 h 22 ; à 10 h 12 il était donc probablement déjà sur l'échafaud. Balthazar a pris l'avion pour les États-Unis autour de 10 h 30. (p. 106)

Au fil du texte, Alma lâche des petites pensées à méditer, sur lesquelles on pourrait philosopher :

Je n'arrive jamais à être seule : je suis donc seule au monde. (p. 36)

L’influence de ses études ne peut être niée (F. A. Finkelstein a 23 ans et est étudiante en philosophie).

Alma se trouve en plus être insomniaque. Qui, une fois, n'a pu trouver le sommeil sait combien les idées divaguent. Pour combler le vide, ou plutôt inversement l'absence de vide puisque trop de pensées lui passent par la tête, Alma se promène avec son spleen dans Paris, à la recherche de quelque chose d'imprécis, peut-être justement le moyen d'oublier :

J'ai trouvé une méthode pour vivre en paix : l'oubli. Mon seul problème étant que mon désir d'oublier ne s'exauce pas. (p. 87)

Ses pensées nous sont livrées en vrac :

Il y a eu approximativement 6 000 000 de Juifs morts dans le monde dit réel ; Bret Easton Ellis a finalisé son projet sous la forme d'un livre. Marcher n'est pas dénué de charme mais il faudrait que je pense à passer mon permis un jour. (p. 97)

C'est ce passage du coq à l'âne, ce changement brusque d'idée qui nous contraint de ne pas lâcher ce livre malgré les nombreuses répétitions (comme dit plus haut, pas des répétitions, mais des variations), d'autant plus que ce monologue s'adresse aussi bien à Alma elle-même qu'à personne, ou bien directement à nous comme témoin par l'emploi du « nous » ou « vous ».

 

À vous de découvrir ce qui amena Alma, jeune fille jusqu'alors « normale » dans cet état second et si elle est capable d'en sortir.

En attendant, la lecture de L'oubli, vous avez trois heures pour disserter sur le sujet d'un prochain baccalauréat de philosophie :

Ce qui est beau, c'est ce qui donne l'illusion de ne pouvoir jamais être oublié. (p. 87)

Olonnois85

 

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