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LOL - Les Olonnois Lisent
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14 mai 2015

Khadija, Marek Halter

Khadija (Les femmes de l'islam, tome 1), Marek Halter, Robert Laffont, 355 p.

 khadijaÀ Mekka (la Mecque) vers les années 590, par l'intermédiaire de son oncle Abu Talib, Muhammad entre au service de la très riche veuve Khadija bint Khowaylid (bint = fille de). Alors qu'elle ne l'a vu que trois ou quatre fois, à 40 ans elle s'est éprise de lui comme une adolescente. Elle épouse ce simple caravanier illettré de 15 ans son cadet. Par ce mariage, Muhammad entre dans la classe des riches et puissants de Mekka. Ils auront un fils, qui décèdera assez jeune, et quatre filles.

Vers 610, alors qu'il a 40 ans, Muhammad se retire fréquemment dans une grotte pour méditer et c'est là qu'il entendra les voix de Jibril (l'ange Gabriel). Sous l'impulsion de Khadija, il fera connaître ces révélations, fondement du Coran.

 

Le roman de Marek Halter couvre la période préislamique de la vie de Mahomet (Mohammad). S'il décrit à la fois des personnages et des faits historiques (Abu Talib, Zayd, Abu Bakr, Waraqá, la peste, la destruction par les eaux et la reconstruction de la Kaaba, etc.), mais aussi fictifs (Ashemou bint Shir, la razzia, les circonstances de la mort de son fils, etc.), c'est avant tout sur l'amour de Khadija pour Mohammad qu'il se concentre.

Sans détourner l'histoire, c'est une vue simplifiée d'une période de la vie du prophète que les historiens eux-mêmes reconnaissent peu connaître. Le biographe, Alfred-Louis de Prémare a déclaré qu'il existe peu de sources fiables, ce qui fait que « toute biographie du prophète de l'islam n'a de valeur que celle d'un roman que l'on espère historique ».

D'autre part, écrire sur l'islam a toujours été — et est plus que jamais — une entreprise délicate. Selon l'islamologue Harald Motzki « d'un côté, il n'est pas possible d'écrire une biographie historique du Prophète sans être accusé de faire un usage non critique des sources ; tandis que, d'un autre côté, lorsqu'on fait un usage critique des sources, il est simplement impossible d'écrire une telle biographie ».

Le but de Marek Halter, rappelons-le, est un roman sur les femmes de l'islam et Khadija en est la première. C'est une veuve certes riche, mais avant tout une femme forte. Elle décide d'épouser un homme de condition simple, 15 ans plus jeune qu'elle, et l'on peut s'imaginer que pour la société d'alors il s'agissait d'un acte tout à fait hors du commun. Lors de la peste, alors que les riches et puissants fuient la ville, elle reste et prend des directives pour lutter contre le fléau (Muhammad se trouve en voyage). Lors de l'inondation et la destruction de la Kaaba, c'est encore elle qui interpelle en public les autres puissants de la ville. C'est elle qui fait détruire les premières statues d'idole. Et lorsque Mohammad a ses révélations qu'il prend pour des hallucinations, c'est toujours elle qui le convainc de les dévoiler. Mais cette femme si forte, Marek Halter en fait une femme amoureuse et très faible devant Mohammed. On pourra y voir une forte contradiction.

Marek Halter sait également user abondamment de cette langue un peu mystérieuse et très imagée utilisée au Proche-Orient. Mais on cherchera en vain une prise de position critique sur la situation des femmes dans l'Orient, leur soumission totale aux hommes, une infériorité qui sera actée dans le Coran. Sans Khadija, Mohammad ne serait jamais devenu ce qu'il est devenu. Sans Khadija, l'islam n'aurait donc jamais vu le jour. C'est le paradoxe de cette religion où la femme est loin d'être à égalité avec l'homme. Une revanche de Mahomet qui subit le joug de Khadija ? (par exemple, il n'osera prendre d'autres femmes qu'après son décès).

Dans seulement une demi-page, Marek Halter se positionne vis-à-vis des religions. Le très érudit Waraqá, cousin monothéiste (chrétien ?) de Khadija (et qui sera le premier à reconnaître Muhammad comme prophète), démontre l'inutilité du culte des divinités jusqu'alors vénérées. Devant Khadija, il écrase des amulettes du dieu Hobal :

« Waraquá retourna sa main droite et laissa tomber les fragments de cornaline sur le sol. De la pointe de sa sandale, il les écrasa, les enfonçant dans la poussière. Après quoi il fixa Khadija sans un mot pendant un court instant.

Entends-tu la fureur d'Hobal ?

Non.

Non, pourtant ceux qui tournent autour de la Ka'bâ en priant Hobal m'arracheraient les yeux s'ils me voyaient piétiner ces amulettes. Et ils gémiraient en attendant la vengeance de leur dieu. » [p. 318]

Puis il jette les cendres des offrandes à la divinité Al'lat :

« Ces cendres ne sont que cendres. Tu peux les piétiner, elle aussi. Tu n'entendras pas la colère d'Al'lat, car la déesse n'est plus dans ton cœur. Les idoles cousine Khadija, ne sont que ce que les mains des hommes en ont fait. C'est-à-dire pas beaucoup ». [p. 319]

Il faut se rappeler que le but de Marek Halter est plus un roman à l'eau de rose sur fond historique qu'un texte réquisitoire. Dans ce sens-là, son but est bien atteint.

Pour ceux qui, jusqu'à présent, se sont peu penchés sur l'islam et ses origines, Marek Halter donne, en arrière-plan de ce texte à la lecture facile, de très nombreuses informations et aussi une image de ce qu'était (peut-être/probablement ?) la vie au Proche-Orient peu avant la naissance de l'islam. Un mérite qui ne peut lui être retiré.

olonnois85

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