Titus n'aimait pas Bérénice, Nathalie Azoulai
Titus n'aimait pas Bérénice, Nathalie Azoulai, Éditions P.O.L., 315 pages
Titus et Bérénice s'aiment. Titus est cependant marié avec Roma dont il a des enfants et dont il ne veut pas se séparer. Il quitte donc Bérénice. De chagrin, celle-ci se procure tout ce qu'elle peut sur Racine et son œuvre « Titus et Bérénice ».
Ce n'est pour Nathalie Azoulai que le motif de nous livrer une biographie de Jean Racine, depuis ses années comme élève à Port-Royal des Champs jusqu'à sa mort. Nathalie Azoulai ne s'en tient pas aux éléments historiques, mais bien plus aux états d'âme de celui qui fut tour à tour élève studieux qui décortiquait les textes grecs et latins tout en s'imprégnant du jansénisme de ses maîtres, du débauché lorsqu'il s'installe à Paris, l'arriviste, du poète et homme de théâtre, de l'amant des actrices de ses pièces, du courtisan, du rival (Molière, Corneille, etc.). Elle nous dépeint un homme qui toujours doute de lui-même tout en étant convaincu de son talent, ses faiblesses dans sa force, son évolution de janséniste à libertin, puis courtisan avant de revenir vers le jansénisme à un âge plus avancé.
Le premier trait de caractère que Nathalie Azoulai donne à Racine est cependant la fidélité : d'abord celle sans faille au roi Louis XIV (de 9 mois son aîné), à sa femme (il n'aurait eu des maîtresses qu'avant son mariage), à ses idées (véhémente défense de la langue), à ses origines (ses maîtres à Port-Royal des Champs), à son cousin et protecteur Nicolas Vitart qui toujours le soutint, aussi une relation décrite parfois avec ambiguïté avec sa jeune tante Agnès de Saint-Thècle Racine (prieure puis abbesse de Port-Royal de 12 ans son aînée).
Au fur et à mesure de l'avancée dans le texte (parfois un peu lent), Nathalie Azoulai semble de plus en plus s'identifier à son personnage au point d'en prendre la rigueur du style. On s'étonne presque qu'elle écrive en prose et non pas en alexandrin. Sur la fin, elle devient de plus en plus rigoriste, comme si elle craignait de ne pas terminer son texte, comme tel est malheureusement le cas pour beaucoup d'autres auteurs.
Compliment à Nathalie Azoulai qui aura su nous donner l'envie de relire Jean Racine, bien que "Racine n'aimait pas le théâtre" aurait été un titre plus adapté à son roman, mais il est vrai, beaucoup moins attirant.
olonnois85