Seule en sa demeure, Cécile Coulon

Seule en sa demeure, Cécile Coulon, L’Iconoclaste, 334 p.

Candre Marchère, riche propriétaire dans le Jura, a été élevé par la servante Henria en même temps qu’Angelin, le fils de celle-ci. Le très croyant Candre perdit sa femme Aleth après seulement six mois de mariage. Deux ans plus tard, il épouse la jeune Aimée d’à peine plus de dix-huit ans. Claude, le cousin d’Aimée que ses parents recueillirent, tente de la mettre en garde et de s’attacher à cet époux en lequel il n’a guère confiance. Ce n’est que sous l’influence d’Émeline, une jeune professeur de musique que Candre fait venir de Suisse pour donner des cours de flûte à sa jeune femme, qu’Aimée comprend que son mari n’est pas franc.

Le roman de Cécile Coulon se déroule au XIXe siècle, dans une ambiance et un style correspondant à cette époque. C’est le règne du non-dit dans cette nouvelle riche bourgeoisie de province qui a remplacé l’aristocratie. Le pouvoir a changé de mains, les mœurs demeurent, les milieux sociaux ne se mélangent pas. Au fur et à mesure que le lecteur avance dans le roman, la tension monte, comme dans un roman policier. L’auteure dévoile peu à peu les secrets gardés, les sentiments cachés. À cela s’ajoute l’ambiguïté du rapport entre Aimée et Émeline, la professeure à peine plus âgée que son élève.

À travers Aimée, l’auteure dépeint ces femmes en cruel manque d’émancipation, taraudée par l’ennui. Elles ne sont là que pour satisfaire leurs hommes au lit et procréer, sans qu'il leur soit nécessaire de leur plaire. Sans la moindre occupation, leur raison d’être est très limitée.

Candre reste un personnage ambigu. S’il est le maître et doit le montrer, il est aussi soumis à celle qui l’a élevé, Henria, sa dévouée servante. En dehors de son court mariage avec Aleth, il ignore tout des femmes. Vis-à-vis de sa nouvelle jeune épouse, il ne sait pas comment se comporter. Incapable de montrer ses sentiments envers elle, il lui cache certes des choses pour la protéger, mais aussi par ignorance.

Cécile Coulonécrit que Candre est un homme très croyant, sans cependant parvenir à le montrer comme tel, aussi bien dans ses propos que dans son comportement. C’est le maillon faible de ce roman.

Bien construit, par son style Seule en sa demeure remet en mémoire Balzac, Flaubert, Maupassantet autres auteurs de l’avant-dernier siècle, en version plus moderne dans la description des ressentis sexuels.

olonnois85